Charte des acquisitions
Charte des acquisitions de la Médiathèque d'Arles
La présente Charte, approuvée par délibération du Conseil Municipal en date du 22 juin 2011, a pour objet de déterminer les conditions d'acquisition selon lesquelles la Médiathèque d'Arles constitue ses collections.
Elle édicte les règles fondamentales qui organisent le choix des collections, tout en mettant à jour les réflexions que se posent les professionnels quant à la constitution des fonds. C'est un point d'appui essentiel pour justifier les dépenses publiques pour l'acquisition documentaire.
Avant de préciser plus avant les dispositions spécifiques à la Médiathèque d'Arles, il convient de rappeler les principes énoncés par l'UNESCO, concernant les missions de la bibliothèque publique :
« La bibliothèque publique est le centre local d'information qui met facilement à la disposition de ses usagers les connaissances et les informations de toute sorte.
Les services de bibliothèque publique sont accessibles à tous, sans distinction d'âge, de race, de sexe, de religion, de nationalité, de langue ou de statut social. Des services et des documents spécifiques doivent être mis à la disposition des utilisateurs qui ne peuvent pas, pour quelque raison que ce soit, faire appel aux services ou documents courants, par exemple, les minorités linguistiques, les personnes handicapées, hospitalisées ou emprisonnées.
Toute personne, quel que soit son âge, doit avoir accès à une documentation adaptée à ses besoins. Les collections et les services doivent faire appel à tous les types de supports et à toutes les technologies modernes, de même qu'à la documentation traditionnelle. Il est essentiel qu'ils soient d'excellente qualité, répondant aux conditions et besoins locaux. Les collections doivent refléter les tendances contemporaines et l'évolution de la société de même que la mémoire de l'humanité et des produits de son imagination.
Les collections et les services doivent être exempts de toute forme de censure, idéologique, politique ou religieuse, ou de pressions commerciales. »
Article 1 – Acquérir
En médiathèque, acquérir, c'est mettre à disposition un choix de documents en engageant pour ce faire, l'argent public et donc, la responsabilité intellectuelle des médiathécaires qui constituent les collections.
Qui achète ?
Il est important de rappeler que les collections sont constituées par le personnel de la médiathèque qui a été formé à cet exercice selon les règles du métier de bibliothécaire. Il est dans ses missions premières d'être garant de la cohérence des acquisitions. Cette charte est donc une garantie que la constitution des collections se fait selon des règles professionnelles s'espérant irréprochables.
Les choix des professionnels
Il existe une disparité entre la réalité du marché sur lequel sont disponibles les documents, et l'exigence des professionnels de médiathèque en matière d'acquisition :
- proposer à la médiathèque le livre comme « ultime refuge de la pensée complexe du monde »
- défendre la « bibliodiversité » (offrir et protéger l'édition indépendante et/ou locale)
- tenir compte de la réalité des droits de propriété attachés aux œuvres (autorisation ou interdiction de prêts et diffusion des films)
- assumer l'écart existant entre l'offre qualitative et la demande quantitative (engouement du public pour certaines pratiques dominantes et indiscutable valeur d'œuvres moins accessibles intellectuellement et commercialement)... autant d'éléments qui circonscrivent l'enthousiasme et la difficulté de la tâche.
En d'autres termes, il s'agit d'aider au discernement ; c'est-à-dire, dans le vaste panorama de l'offre globale, de montrer aussi ce qui n'est pas toujours discernable, de rendre visible le produit des terroirs culturels à disposition sur « les marchés de proximité » via le service public.
Article 2 – Les collections
Le principe de base des collections, quelles qu'elles soient, est de répondre au plus grand nombre de lecteurs. Pour ce faire, les collections doivent être représentatives de tous les champs du savoir et de la connaissance.
Elles doivent être régulièrement renouvelées et respecter, par leur diversité, les différents niveaux du public, depuis les lectures faciles jusqu'au public universitaire. Elles constituent un ensemble encyclopédique et pluraliste.
Ces collections sont raisonnées, c'est-à-dire inscrites dans la durée, dans l'histoire, et constituées d'œuvres sélectionnées, pour répondre à des besoins d'information, de documentation, de formation, de loisir, d'enrichissement personnel des individus. Elles servent la population sans exclusive ni privilège.
A ce titre sont exclus des collections :
- les documents à caractère raciste ou portant atteinte à la dignité humaine
- les documents émanant directement d'un parti politique ou des différentes églises, confessions, sectes
- les documents émanant de la propagande d'un état ou du marketing d'une entreprise
- également exclus les manuels scolaires au regard de leur limite de validité
- les documents à caractère évènementiel, (politique, people etc...) dont l'intérêt est limité dans le temps.
A contrario sont privilégiés par notre politique d'acquisition :
- les œuvres des auteurs et des créateurs peu présents dans le circuit commercial
- les œuvres plus confidentielles à diffusion lente
- le travail des éditeurs et labels indépendants qui portent à notre connaissance une production plus marginale, originale, fraiche et différente.
C'est pourquoi sont proposés au public, les domaines de la création et de la pensée tels que les essais, le théâtre, la poésie, les albums pour la jeunesse (esthétique de qualité, illustrations originales ou innovantes, pop up...), le film d'animation, le court métrage, le documentaire de création, le champ des musiques dites nouvelles, (lutherie expérimentale...), musiques régionales, locales, le patrimoine, la tradition, la pensée critique et des pans entiers de la création tombés dans l'oubli.
Les documents sont achetés chez les fournisseurs qui, ayant soumis leur candidature au marché public de la ville, ont été retenus par la Commission d'Appel d'Offres. Dans le cadre de cette contrainte juridique, on trouvera sur les rayonnages des collections représentatives de la production littéraire, documentaire, musicale, cinématographique, tout domaine, genre et style confondus.
Ces collections sont équilibrées entre l'achat régulier de « nouveautés » et les achats dits « rétrospectifs » (œuvres importantes rééditées, manques, rachats...etc).
Plus spécifiquement, on trouvera aussi des documents à fin pédagogique faisant écho aux formations proposées par l'« Atelier Informatique », une grande majorité de films estampillés « cinéma d'auteur », des partitions, un fonds opulent de musique de jazz et pour la harpe, des livres en gros caractères, des audio-livres à destination des publics mal voyants, des méthodes de langue et des livres en langues étrangères, un fonds conséquent de livres sur l'art, une collection de « livres d'artistes », un fonds pédagogique « jeunesse », un fonds historique de littérature jeunesse, des collections patrimoniales régulièrement enrichies.
Article 3 – Les dons de documents par les lecteurs
Les dons de documents sont étudiés par l'équipe des médiathécaires qui se réserve seule le droit de les accepter ou non.
L'état des documents ainsi que leur intérêt, sont scrupuleusement étudiés. La médiathèque ne doit pas être une « poubelle publique » et ceux qui donnent des livres, ou des disques, (films exclus pour cause de droits) sont invités à se demander s'ils aimeraient trouver dans les rayonnages des livres et disques en l'état de ceux qu'ils s'apprêtent à léguer.
De plus la médiathèque se réserve également le droit de redistribuer ces documents à des bibliothèques d'associations, de prisons, d'hôpital ...etc, dans la mesure où elle aurait déjà ces titres à son catalogue.
Il faut savoir que les dons ont un coût de traitement et d’équipement, et doivent, comme les acquisitions courantes, satisfaire aux conditions énoncées dans la présente charte.
Article 4 – Le désherbage
Garder vivante une collection nécessite non seulement une politique d'acquisition clairement définie, mais également une politique de pilon.
Dans une médiathèque il ne s'agit pas d'accumuler les documents mais de créer une dynamique entre les acquisitions et les éliminations
Il faut s'imaginer que le fonds documentaire d'une médiathèque est une plante vivace qui mérite des soins constants. C'est pourquoi il faut, tout en lui permettant de grandir et de se fortifier, élaguer et tailler les branches mortes ou celles qui ne donnent plus ni fleurs ni fruits.
C'est ce que l'on appelle le désherbage.
Le désherbage consiste à retirer des collections les documents usés, salis, désuets, contenant des informations erronées ou obsolètes. S'ils n'étaient pas régulièrement écartés, ces documents nuiraient à la qualité des collections et au sérieux de la médiathèque, à sa fiabilité.
Conclusion
Une médiathèque n'est pas un « magasin gratuit », mais un lieu généreux où il est encore possible de prendre le temps des découvertes longues, de se laisser surprendre, et où il n'est jamais grave de se tromper.
La médiathèque est un lieu où l'on peut flâner, être emporté vers ce qui n'était pas prévu et trouver mille autres choses.